Photo de Valentin Lecocq.
Pourim est le dernier livre sacralisé, et dans lequel le nom de D.ieu n’est pas mentionné.Au quatrième siècle avant notre ère, les Juifs vivaient dans le Royaume perse d’Assuérus. Celui-ci a fait tuer son épouse Vachti qui refusait d’assister à un banquet. Il cherche une nouvelle reine et choisit, sans connaître ses origines, Esther, nièce de Morcekhaï, dirigeant les juifs du royaume.
Le Premier ministre Haman, antisémite descendant d’Amalek, se vexe du refus de Mordekhaï de se prosterner devant lui. Il convainc le Roi d’exterminer tous les juifs en un seul jour, tiré au sort (pourim signifie sort), le 13 Adar.
Morcekhaï demande à Esther d’intervenir. Elle est d’abord réticente.
Il lui répond ensuite par ces fameuses paroles : “Car si tu persistes à garder le silence à l’heure où nous sommes, la délivrance et le salut surgiront pour les juifs d’autre part. Et qui sait si ce n’est pas pour une conjoncture pareille que tu es parvenue à la royauté?”.
Cette approche réfère à la question de la vocation, de la mission, que l’on retrouve dans la paracha Vayikra: “Et Il appela Moïse”. La tâche nous transcende et nous met au défi de vivre au-delà du simple intérêt personnel.
Finalement, Esther interpelle le roi: “Comment puis-rester silencieuse et regarder?”
A Pourim, il est de tradition d’être joyeux (marbim besim’ha). “Dès le début du mois d’Adar, nous augmentons en joie.”
Alors, que le premier décret génocidaire contre le peuple juif avait été avorté, la joie est-elle l’émotion appropriée ?
La joie habituelle que nous ressentons lorsqu’un heureux événement se produit est une joie expressive.
La Sim’ha d’Adar, par contraste, est une joie thérapeutique: si la Solution finale fut avortée, elle fut annoncée. Les juifs se sont rendu compte de leur vulnérabilité. L’existence même de Pourim dans notre mémoire historique constitue un traumatisme.
La réponse juive au traumatisme est contrintuitive et extraordinaire. On vainc la peur par la joie. On vainc la terreur par la célébration collective: “Ils ont tenté de nous tuer. Nous avons survécu. Allons manger.”
L’humour est la façon juive de contrer la haine. On n’est jamais prisonniers de tout ce dont on peut rire.
Il ne faut pas craindre l’avenir, car nous avons déjà connu l’adversité. Cette chanson inspirée du Psaume 23 l’illustre également:
Malgré tout je marcherai
Dans l’ombre de la mort
Je n’aurai pas peur
Parce que tu es avec moi
Je sens mes larmes
Et ma foi en toi me sauvera
Hag sameah
*Inspiré des enseignements du Rabbi Lord Jonathan Sacks