Ostraka : sont inscit les noms de : Aristides, Themistokles, Kimon and Perikles. 5ème siècle avant notre ère. Agora Museum. Athens.
La paracha aborde le traitement du Tsaraat, la maladie punissant le lashon hara, le commérage.
Lashon hara
Metzora poursuit le récit lié au Tsaraat, et donc au lashon hara (paroles malveillantes). C’est dire l’importance que les sages, et en particulier Maïmonide, y attachaient.
Ils considéraient en effet que le lashon hara était aussi grave que les trois péchés majeurs combinés, ceux qui nécessitaient une punition et excluaient leur auteur du monde à venir (l’idolâtrie, les relations sexuelles illicites et verser le sang).
La description de tsaraat, et la manière de le traiter, permettent de comprendre qu’il ne s’agissait pas d’une maladie contagieuse, mais d’une question de pureté, nécessitant la mise au ban de la société.
L’anthropologue Ruth Benedict oppose les sociétés de la honte (japon, Grèce antique) dans lesquelles ce qui compte est le regard des autres (conformisme), et la société de la culpabilité (calvinisme), dans laquelle chacun fait face à sa propre conscience.
Le judaïsme est fondée sur la culpabilité. Tsaraat est donc une exception, un traitement particulier se fondant sur la honte d’un stigmate visible de tous et l’ostracisme de son traitement (exclusion du groupe pour une certaine durée).
Quelle est la conséquence pour le judaïsme d’être une culture de la culpabilité et pas de honte?
La honte s’attache à la personne, alors que la culpabilité s’attache à l’acte. Dans les cultures de honte, les fauteurs ont tendance à se cacher, s’exiler où personne ne connaît leur passé, voire se suicider. Les héros des pièces de théâtre dans cette culture finissent toujours par mourir, leur rédemption étant impossible. La culpabilité, au contraire, distingue le fauteur de la faute. La culpabilité peut être rétablie par la rédemption, la confession, le remord, la réparation.
Malgré la gravité attribuée par les sages aux commérages, l’histoire juive est faite d’épisodes tragiques dans lesquels les juifs ont usé de cette méthode dans des crises internes.
Au treizième siècle, une importante dispute est intervenue entre partisans et critiques de Maïmonide, chaque camp prononçant des excommunications. Dans la foulée, les Dominicains ont interdit les textes de Maïmonide puis les exemplaires du Talmud ont été brûlés.
Au dix-neuvième siècle, le grand rabbin de Roumanie (Malbim), était très critiqué par les juifs “éclairés” qui lui ont envoyé pour Purim une boîte contenant du crabe et du porc. Le rabbin fut accusé, en imposant les lois de la casherout, d’empêcher les juifs progressistes de s’intégrer. De fausses accusations furent établies et il fut expulsé du pays.
Les rabbins hassidiques ont également été les victimes régulières de fausses accusations provenant des milieux orthodoxes (mitnagdim), comme le procès de Boston en 1941.
A travers les âges, les juifs se sont opposés et ont usé entre eux de méthodes radicales (excommunications, dénonciations, fausses accusations). Ce faisant, ils ont transformé la religion de l’argumentation en religion de l’anathème, laissant penser, à tort, qu’il n’y avait qu’une interprétation possible.
Pourtant, le Talmud rappelle que l’interprétation de la maison de Hillel a été acceptée précisément parce qu’elle était humble, et surtout présentait les arguments de ses opposants avant les siens.
Les règles de pureté
La paracha détaille également les règles de pureté, qui concernent les écoulements biologiques, tant chez l’homme que chez la femme.
Yeshayahou Leibowitz rappelle que la Torah ne se préoccupe pas seulement de ce qui est dit à la fin de la sidra Shemini: “Vous vous sanctifierez et vous serez saints” (Lv 11,45), paroles que l’on pourrait croire ne concerner que les choses de la conscience et de l’esprit. Elle traite aussi de ce qu’il a appelé les souillures biologiques de l’existence humaine. Ces souillures biologiques font partie intégrante de la réalité humaine naturelle. L’homme a reçu l’ordre de rendre un culte à Dieu dans cette réalité-là.
Shabbat shalom
*Inspiré des enseignements du Rabbi Lord Jonathan Sacks