Judaïcausette© avec Joanna Peczenik

Née à Bruxelles en 2001, Joanna Peczenik est coprésidente de l’Union des Etudiants Juifs de Belgique (UEJB) depuis juin 2021, avec Sacha Guttmann. Etudiante en 3ème année de bachelier à SOLVAY (ingénieur de gestion), Joanna milite au sein de l’UEJB, sans oublier le féminisme qu’elle porte haut et fort, dans une perspective égalitaire. Joanna est également musicienne et passionnée de volley-ball.

DEFINITION : Quelle serait votre définition de la culture juive ?

Je pense que la culture juive est assez difficile à définir. A l’UEJB, nous disons qu’elle se construit autour de la liberté. On le constate, les haltes de l’histoire juive – telles, la fête de Pessah qui célèbre la sortie d’Egypte et de l’esclavagisme ; de la révolte maccabéenne à la révolte de Massada ou, plus proche de nous, la révolte du ghetto de Varsovie – sont construites autour de la notion de liberté. Le peuple juif semble y aspirer à n’importe quel prix.

Par ailleurs, lorsque nous avons défini le chemin que nous voulions emprunter à l’UEJB ainsi que les valeurs qui sous-tendraient nos actions, il a d’emblée été question de culture juive, au son sens large, parallèlement à l’organisation de débats, de formations, de conférences ainsi qu’à la création d’un lieu de vie dans la maison de l’UEJB. Voilà ce qui nous est paru essentiel ! Ces diverses activités tournent autour de la notion de liberté : de la culture de la liberté !

RESSENTI : Comment définiriez-vous votre culture juive ? Comment la vivez-vous ?

Je suis née dans une famille juive mixte, sépharade et ashkénaze, donc j’ai toujours été baignée dans la culture juive. Ensuite, j’ai fréquenté des écoles non-juives tout en m’investissant à la JJL (Jeunesse Juive Laïque). J’ai donc été entourée d’amis qui ne partageaient pas forcément ma culture – ce qui m’a permis de comprendre ses particularités – tout en m’engageant au mouvement de jeunesse. J’y ai beaucoup appris sur les valeurs juives ou la transmission de la Mémoire. Puis, arrive le moment où on devient madrih.a (moniteur) et c’est à notre tour de transmettre aux plus jeunes. Et si, en tant qu’adolescent, on ne réalise pas, dans la

continuité, l’importance de la mission du madrih.a, mon implication s’est clairement confirmée à mon entrée à l’UEJB. Aux questions : « pourquoi est-ce qu’on s’engage, pourquoi transmet-on cette culture, comment parler de la Shoah ? », nos réponses ont permis de redéfinir le sens de nos combats contre l’antisémitisme, le racisme, la xénophobie et contre toutes les discriminations, quelles qu’elles soient.

LITTERATURE : Quels auteurs, ouvrages, vous ont-ils touchée ?

J’ai été fort marquée par « Une vie », l’autobiographie de Simone Veil. L’énergie que Simone Veil a mise dans ses combats a forgé son histoire. J’ai une grande admiration pour la femme et pour les valeurs qu’elle a portées toute sa vie : elles traversent courageusement son livre. L’auteure et l’œuvre sont profondément inspirantes pour moi qui me revendique féministe, c’est-à-dire pour l’égalité entre les hommes et les femmes. Les droits pour lesquels Simone Veil s’est battue sont incroyables pour son époque. Et toujours d’actualité. Je crains que le chemin à parcourir soit encore long. J’ai aussi envie de mentionner Gisèle Halimi, avocate, militante, auteure, qui, elle aussi, a lutté pour les droits des femmes : elle est un symbole fort. Sa personnalité et ses combats ont inspiré quelques générations de femmes. A travers ces références et d’autres, je constate que des femmes, juives, cultivées, se sont érigées, avec force et dignité dans de cruciales questions de société. Elles sont devenues des « cheffes » de files respectables et respectées. Identité juive, féminité, droits et libertés semblent s’être donné rendez-vous sur la route de l’Histoire. Je n’oublie néanmoins pas les hommes qui partagent ces valeurs et qui s’expriment en faveur de cette égalité.

ARTS PLASTIQUES : Un peintre, sculpteur, artiste, œuvre juive…

En tant que grande amatrice de bande dessinée, je pense à Maus de Art Spiegelman. Ce récit intime, accessible aux petits comme aux grands, mais également à tous les publics, est pédagogique, même si le sujet abordé reste très difficile. J’ai lu cette BD assez jeune. Créée en 1980, elle n’a rien perdu de sa puissance ni de sa symbolique.

Je songe à une autre bande dessinée qui est Le chat du rabbin de Joann Sfar, un autre puits de culture ! Les dessins sont magnifiques et il me semble qu’une adaptation a été faite au cinéma. Voilà encore une œuvre qui rend la culture juive accessible à toutes et à tous, à des personnes qui ne la connaissent pas spécialement et qui peuvent y découvrir des aspects moins exposés ou stéréotypés de la culture juive, telles les réunions familiales, les fêtes, les moments de joies, la cuisine ou la musique. Ces œuvres démystifient, en quelque sorte, la culture juive.

7EME ART : Quels films, réalisateurs, documentaires, vous reviennent-il en mémoire ?

Je me souviens d’un film que j’ai vu quand j’étais jeune : Yentl de et avec Barbra Streisand. Il y est question d’accès au savoir, de tolérance et de liberté, on y revient. Il y a aussi cette volonté d’émancipation d’une femme afin de pouvoir accéder, au même titre que les hommes, à l’éducation. Les musiques et le jeu d’actrice de Barbra Streisand sont magnifiques et les propos du film, universels.

PENSEE JUIVE : Etes-vous proche de la/d’une pensée juive /d’un philosophe ?

Je pense au concept du « Tikkoun Olam » ou l’idée de continuellement parfaire le monde. C’est une valeur centrale qui nous porte à l’UEJB mais aussi personnellement. C’est une posture que l’on adopte face aux discriminations – qui ont, en général, une même origine et qui s’expriment sous forme de haine, d’ignorance, de cynisme, de fanatisme – à l’encontre de certaines populations ou minorités. Le Tikkoun Olam éveille nos consciences pour, notamment, lutter contre les différenciations et privations de libertés de par le monde : celles envers les femmes, celles que subissent les victimes du racisme, la communauté LGBTQ+ ou encore les Ouïghours. Il y en a tant.

SOUVENIR : Pourriez-vous nous confier un moment de partage et de joie de culture juive ?

Je pense encore à la fête de Hanouccah 2021/5782, que nous avions chaleureusement célébrée avec le comité de l’UEJB. Suite à l’allumage des bougies ensemble, nous avons discuté, échangé, partagé, les projets passés et futurs. (*)

Et je pense aussi à l’illumination hautement symbolique que nous avions faite l’an passé. Le premier jour de Hanouccah tombait le 10 décembre 2020 soit la journée internationale des Droits de l’Homme. Nous avions été poser le 1er article de la Déclaration des Droits de l’Homme au pied de l’ambassade de Chine pour clamer :
« Plus jamais ça maintenant ». Le génocide des Ouïghours est toujours en cours ! En tant qu’héritiers directs de la Shoah nous martelons : « Plus jamais ça », « Plus jamais ça maintenant » parce que, hélas, ces atrocités sont encore d’actualité. Nous voulions, avec cette première bougie, éclairer les droits humains et dire, qu’en tant que Juifs, nous nous engagions, à travers la symbolique de Hanouccah, à appliquer les enseignements de cette fête, à savoir : apporter de la lumière, agir et espérer.

* Nous avons également allumé une hanoucciah (chandelier de Hanouccah) devant la maison communale d’Alost pour envoyer un message public au bourgmestre de cette ville flamande qui autorise, sans complexe, la présence de chars aux caricatures antisémites lors de leurs sinistres carnavals…

A.K.

Vidéo de l’action de l’UEJB à Alost : https://www.youtube.com/watch?v=-RpeB8Rdl8I
Site de l’UEJB : https://www.uejb.org
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