Les musiques juives dans les ghettos et les camps.

Par Daniel Crombez,

Ceci est une approche, une image bien modeste de cet immense sujet assez peu connu dans les milieux « étrangers aux juifs » (Goy dans son sens littéral).
Mon but est ici de susciter la curiosité et de témoigner de cet aspect tragique et culturel, alors que les témoins direct disparaissent. Immense sujet par sa complexité, ses diverses origines, le contexte dramatique alors que la musique accompagne la mort, distrait les bourreaux ou sert à la propagande filmée. Vous trouverez mes sources en fin de texte.

Il faut distinguer la production musicale dans les premiers camps (1933), et la production d’après 1939 dans les ghettos d’une part, et dans les camps de concentration et d’extermination de l’autre. Des chants qui rendent compte de la vie dans ceux-ci ou des chants de « résistance » sont écrits et se voient évidemment interdits par l’oppresseur, mais cela n’empêche pas la création d’un répertoire important. La libération et l’exil de quelques prisonniers fait connaître ces premiers chants en Grande Bretagne déjà en 1937. (le « Moorsoldatenlied » chant des soldats du marécage, chanté dès 1933). Dans les camps c’est à partir de 1940 que des orchestres juifs et tziganes (Lagerkappelle) se forment et que des compositeurs écrivent pour ceux-ci afin d’accompagner les repas des SS, jouer pendant les exécutions, masquer la réalité. Dans le « grand public », actuellement ne sont connus par la filmographie ou des documents : « Le Pianiste » sorti en 2002, histoire vraie de Wladyslaw SZPILMAN (1911-2000) et une autre célébrité moins connue Alma ROSÉ (1906-1944), violoniste et conductrice d’orchestre à Vienne arrêtée en France en 1943, elle sera conductrice de l’orchestre féminin d’Auschwitz – Birkenau, elle y laissera sa vie en avril 1944, sa mère était la sœur du compositeur Gustav MAHLER.
Le camp de Theresienstadt avait un statut « particulier », les nazis s’en servaient de « vitrine » pour tromper les visiteurs de la croix rouge, il y avait, un orchestre, un cabaret-théâtre, un ensemble de jazz les « Ghetto Swingers », une troupe d’enfants qui après des représentations, étaient transportés vers Auschwitz…
Tous ces artistes étaient sélectionnés pour leurs compétences ou leur notoriété de chef d’orchestre. La trace de cet épisode est relatée dans le film du cinéaste Kurt GERRON interné en 1943 en Hollande au camp de transit de Westerbork et transféré en 1944 à Theresienstadt, film de propagande commandé par les SS…K.
Gerron sera tué en novembre 1944. Les ghettos…le plus connu est Varsovie et peut-être Lodz certes, mais il y eu près de 1000 ghettos de quelques centaines à 500 000 personnes. On compte 278 ghettos en Pologne, 352 en Biélorussie, l’Ukraine ayant subi la « Shoah par balles », les ghettos ukrainiens servaient au regroupement avant les massacres ; on estime entre 900 000 et 1 600 000 les victimes du « Generalplan Ost » relatif à la solution finale et l’utilisation des « einsatzgruppen et einsatzkommando » encadrés par la SS et souvent constitués de gens « du cru ».
La musique diffère selon l’organisation des ghettos et de leurs responsables, soit on crée, soit on se base sur le socle existant, mais il y aura toujours un mouvement de résistance au moins culturelle quand la résistance armée est anéantie. Un concours est organisé pour un chant patriotique, ainsi naît le « Partizaner Lied » qui titre « Zog nit keynmol » (ne dit jamais…), poème mis en musique par Hirsch Glik (1922-1944), il s’inspire des échos du soulèvement du ghetto de Varsovie.

C’est à partir de 1947-48 que sont rassemblés ces documents, chants, partitions, scènes filmées ou photographies retrouvés ou collectés majoritairement au États Unis (Holocaust Memorial, Washington), étant rédigés en Yiddish, Allemand ou Anglais, et grâce à la migration outre Atlantique importante des rescapés des camps. Leurs œuvres sont l’écho d’une souffrance, de la vie dans des conditions déshumanisées, de deuil encore inachevé aujourd’hui… Cette volonté de création liée à la vie et au refus de la mort.

Daniel Crombez

Sources (références non exhaustives) :
« Les musiques de la Shoah » J.J.Levy vol 20 n°2,
2008« Music and the Holocaust » K.Gerron« Paradoxes de la musique dans les ghettos… » J-S Noël Université de La Rochelle.
« La musique dans le système concentrationnaire nazi » A. du Closel manuel pédagogique PDF.
Wikipédia – https://holocaustmusic.ort.org/…/overview-music-camps/
Youtube :
1. Zog nit keynmol. https://www.youtube.com/watch?v=D4OiDY29jFs
2. Moorsoldatenlied. https://www.youtube.com/watch?v=oCzBkZTzMRs
3. Alma ROSÉ a tribute. https://www.youtube.com/watch?v=DXc4h4Pw0QY
et aussi enregistrée en 1928 (assassinée à Auschwitz en avril 1944). https://youtu.be/0WMPUcXsrqY
4. Kinderjohren (Cracovie) (de M.Gebirtig. https://www.youtube.com/watch?v=U8VQz69Id7cyoutube.comKinderjohren yiddish song from CracowPerformed by the norwegian-jewish singer and actress Bente Kahan. She w

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